Monday, December 8, 2014

« L’essence des médias n’est pas l’information. C’est le pouvoir. »

« L’essence des médias n’est pas l’information. C’est le pouvoir. »

Global Research, décembre 03, 2014
La semaine dernière, le célèbre journaliste John Pilger a participé à une série de Questions-Réponses avec Des Freedman (le 18 novembre 2014), membre de la Media Reform Coalition (coalition pour la réforme des média) ; c’était à l’occasion de la sortie du nouveau livre de Des Freedman « The Contradictions of Media Power » (les contradictions du pouvoir des médias.) Nous avons extrait les meilleures citations de cette intervention de John Pilger, ce qui donne un aperçu de son expérience et de sa compréhension du pouvoir des médias ; nous pouvons tous en apprendre. Et il a véritablement été brillant.

Aujourd’hui les médias sont, comme l’avait décrit le père de la propagande, Edward Bernays, « un gouvernement invisible ». Ils font partie du gouvernement. Ils défendent les intérêts du gouvernement. Le premier ministre est un chargé de relation publique de profession, et pas des meilleurs. C’est tout ce qu’il est. Il ne doit pas être pris au sérieux, c’est juste son rôle. Cette position lui confère certains aspects du pouvoir. Mais le véritable pouvoir réside dans la propagande et les médias. C’est aujourd’hui le cas sur la planète entière.
Durant les prémices de l’invasion de l’Irak, le journalisme a joué un rôle critique dans la concrétisation de l’invasion. Particulièrement aux USA, qui ont – selon la constitution – la presse la plus libre du monde.
Quand je discute de cela avec nombre de collègues distingués aux Etats-Unis et ici, à la suite de l’invasion, ils étaient unanimes, si les journalistes aux postes concernés, à la télévision et dans les journaux (surtout à la télévision, à cause de son pouvoir), si ils avaient contesté les mensonges, s’ils les avaient confrontés, s’ils avaient fait ce qu’est censé faire un journaliste, s’ils avaient, comme le dit Dan Rather de CBS – posé les questions critiques, au lieu d’amplifier et de faire écho aux mensonges, s’ils avaient fait leur travail, ils pensent tous que l’invasion n’aurait pas eu lieu. Le fait qu’ils disent ça, et il s’agit de membres éminents des médias des deux côtés de l’Atlantique, que si les journalistes avaient fait leur travail, l’invasion aurait pu ne pas avoir lieu, et des centaines de milliers de gens seraient encore en vie aujourd’hui. C’est le véritable pouvoir des médias.
Vous travaillez au sein d’un système qui est par nature hostile à la vérité. Je le dis sans ironie, je le pense vraiment. Il est hostile à la vérité. Il suffit de constater la réaction des médias face aux lanceurs d’alertes comme Edward Snowden, Julian Assange. La réaction amère de ceux qui font honte aux médias, tous en chœur.
Il y a ce qu’on appelle la censure par omission. Vous ne discutez pas de ce que vous choisissez d’ignorer, mais ça passe à la trappe.
Si vous remontez à 2008, les histoires sur BBC News, dans tous les journaux, les banques étaient soudainement des escrocs. Quand la Northern Rock s‘est effondrée, les banques étaient des escrocs, elles étaient toutes exposées. Le Guardian était rempli d’articles sépulcreux sur comment les banques étaient pourries de l’intérieur. C’était l’info du jour.
Un aperçu. Cette histoire s’est essoufflée après trois mois et fut totalement inversée, ce n’était plus les banquiers, mais le résultat d’une dette nationale et d’une narrative contrôlée qui était là et qui s’appelait austérité et cette dette devait être payée. Pourquoi ? Pourquoi devait-elle l’être ? Les gens que vous citez (46% des gens pensent que l’austérité va trop loin ou n’est pas nécessaire) c’est une majorité. Si vous obtenez cela dans les sondages, 46%, c’est une majorité. Cela prouve encore que la plupart des gens ont cerné les médias. Ils les ont cernés, en terme de guerre, d’économie, de mode de vie. Nous avons donc entre-aperçu la vérité sur cette criminalité massive, toute cette architecture pourrie s’était effondrée, enfin presque. Les banques furent nationalisées, sans conditions. La conscience des raisons pour lesquelles c’était arrivé, qui fut présente pendant environ 6 mois, fut, grâce à un système de propagande très efficace, totalement effacée. Ce n’était plus la faute des banques, mais « nôtre faute ».
Nous devrions arrêter d’utiliser le terme mainstream. C’est une appellation erronée. Nous en sommes toujours à regarder à travers ce prisme qu’on appelle mainstream. Ce n’est pas du tout mainstream. C’est en réalité extrême. Qu’y-a-t-il de plus extrême qu’une multitude d’institutions qui propagent des guerres illégales et voraces, des mensonges sur les politiques économiques. Qu’y-a-t-il e plus extrême que cela ? Il n’y a rien de mainstream là-dedans. Le plus grand institut de propagande, en Angleterre, c’est la BBC. Et ce parce qu’il est le plus connu. Il bénéficie de la plus grande crédibilité. Sa renommée est mondiale. Par certains aspects ça peut être mérité. Dans le domaine de l’actualité et des affaires courantes, ça ne l’est absolument pas. Et, encore une fois, ce n’est pas de l’ironie. Donc cette idée que l’on se concentre sur les démons, Murdoch, Le Daily Mail (assez mauvais)…d’une certaine façon le Mail et la BBC se complètent l’un l’autre et se suivent… il s’agit de comprendre le spectre de la propagande et la façon dont cela nous affecte.
Les journalistes doivent-ils représenter le peuple ? Oui, bien sûr, mais comme l’a dit Martha Gelhorn : « Tout journalisme doit se faire depuis la base, pas depuis le sommet ». Ce n’est quasiment jamais le cas. Et c’est quelque chose qu’il faut enseigner aux jeunes journalistes. Ces choses élémentaires que vous faites, les sources d’informations les plus fiables, la manière de chercher la vérité, doit se faire depuis la base. C’est mon expérience en tant que reporter. Et j’ai été amené à me rendre compte que ceux qui sont au-dessus de la base, particulièrement ceux d’en-haut, n’étaient pas des sources fiables d’information.
John Pilger

Article original en anglais :
Traduction Nicolas Casaux du 4eme singe

L’entretien intégral : Le président syrien Bachar el-Assad reçoit Paris Match

L’entretien intégral : Le président syrien Bachar el-Assad reçoit Paris Match

Global Research, décembre 05, 2014
Samedi 29 novembre, dans un des bureaux du président syrien, à Damas. Rien ne laisse présager la guerre civile qui se joue au dehors. Sauf des dessins, ceux d’orphelins de soldats réguliers tombés sous le coup d’attentats « terroristes », mêlés à ceux de ses propres enfants. © Paris Match

En exclusivité, l’entretien accordé par le président syrien Bachar El-Assad à Paris Match, le samedi 28 novembre, dans la capitale syrienne.

Monsieur le Président, après trois ans de guerre, au point où nous en sommes aujourd’hui, regrettez-vous de ne pas avoir géré les choses différemment au début, lorsque les premiers signes de révolte sont apparus, en mars 2011 ? Vous sentez-vous responsable ?
Bachar El-Assad. Dès les premiers jours, il y avait des martyrs de l’armée et de la police. Nous avons donc, dès cette époque, fait face au terrorisme. Il y avait des manifestations, certes, mais pas en grand nombre. Notre seul choix était de défendre le peuple contre les terroristes. Il n’y en avait pas d’autres. Nous ne pouvons pas dire que nous le regrettons, puisque nous luttions uniquement contre le terrorisme. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait pas eu d’erreurs commises dans la pratique. Il y a toujours des erreurs. Parlons aussi franchement : si le Qatar n’avait pas financé dès le début ces terroristes, si la Turquie ne leur avait pas apporté un soutien logistique et l’Occident un soutien politique, les choses auraient été différentes. La Syrie connaissait des problèmes avant la crise, ce qui est normal, mais cela ne signifie pas qu’il faille trouver aux événements une origine intérieure.
Durant cette guerre, on reproche à votre armée d’avoir utilisé massivement la force. Pourquoi bombarder des civils ?
Lorsqu’un terroriste vous attaque, croyez-vous que vous pouvez vous défendre par le dialogue ? L’armée a eu recours aux armes lorsque l’autre partie en a fait usage. Notre but ne saurait être de frapper les civils. Comment peut-on résister pendant près de quatre ans en tuant des civils, c’est-à-dire son propre peuple, et en même temps combattre les terroristes et les pays hostiles qui les soutiennent, à savoir ceux du Golfe, la Turquie et l’Occident ? Si nous ne défendions pas notre peuple, nous serions incapables de résister. Par conséquent, il n’est pas logique de dire que nous bombardons les civils.
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A gauche, le président Bachar el-Assad et l’envoyé spécial de Paris Match à Damas, Régis Le Sommier.© Paris Match

A PROPOS DE SON DÉPART : “DANS LA TEMPÊTE, LE CAPITAINE NE PREND PAS LA FUITE”

Des images par satellite de Homs ou de Hama montrent des quartiers oblitérés. L’Onu, à laquelle adhère votre pays, parle de 190 000 morts au cours de cette guerre. Les habitants de ces quartiers étaient-ils tous des terroristes ?
D’abord, il faudrait vérifier les statistiques des Nations unies. Quelles en sont les sources ? Les chiffres qui circulent aujourd’hui dans le monde, notamment dans les médias, sont exagérés. Ils sont faux. Ensuite, les images de destructions ne sont pas seulement des photos par satellite, mais des photos prises sur le terrain. Ces destructions sont réelles. Lorsque des terroristes pénètrent dans une région et l’occupent, l’armée doit la libérer. Des combats sont alors engagés. Il est donc normal qu’il y ait destruction. Dans la plupart des cas, lorsque les terroristes s’installent, les civils prennent la fuite. En vérité, le plus grand nombre de victimes en Syrie se compte parmi les partisans de l’Etat et non l’inverse. Beaucoup ont été tués lors d’attentats. Quand vous avez la guerre et le terrorisme, il y a hélas des victimes innocentes. Ça arrive n’importe où, d’ailleurs. Mais il n’est pas concevable qu’un Etat vise ses propres citoyens.
Toujours selon l’Onu, 3 millions de Syriens sont réfugiés dans les pays limitrophes, soit un huitième de la population. Est-ce que ce sont tous des alliés des terroristes ? 
Non, non. La plupart de ceux qui ont quitté la Syrie l’ont fait à cause du terrorisme. Parmi ces réfugiés, certains soutiennent les terroristes, d’autres l’Etat. Ces derniers ont quitté le pays pour des raisons de sécurité. Une grande partie des réfugiés ne soutient personne.

“LES FRAPPES AÉRIENNES DE LA COALITION NE SONT NI SÉRIEUSES NI EFFICACES. ELLES NE NOUS AIDENT PAS”

D’un point de vue militaire, avez-vous les moyens de gagner la guerre ? 
A présent, nous combattons des Etats, pas seulement des bandes. Des milliards de dollars leur sont versés. Des armes leur ont été fournies par des pays comme la Turquie. Il ne s’agit pas d’une guerre facile d’un point de vue militaire. Pourtant, l’armée syrienne progresse dans beaucoup de régions. Personne ne peut encore prévoir quand cette guerre prendra fin, ni comment. Nos adversaires pensaient, au début, gagner le cœur des Syriens. Ils n’y sont pas parvenus. Ils ont perdu le soutien de la population locale. C’est précisément ce qui a permis à l’armée de progresser. Nous devons envisager la guerre d’un point de vue militaire, social et politique.
Mais ils n’ont pas encore perdu, puisque la moitié de votre pays vous échappe.
L’armée syrienne ne peut être partout à la fois. Là où elle n’est pas présente, les terroristes en profitent pour franchir les frontières et s’infiltrer dans telle ou telle zone. Mais chaque fois que l’armée décide de reprendre une région, elle y parvient. Il ne s’agit pas d’une guerre entre deux armées, où l’une occupe un territoire et la seconde un autre. Il s’agit d’un autre type de guerre. Nous avons affaire à des groupes terroristes qui s’infiltrent dans une ville ou dans un village. Cette guerre sera donc longue et difficile.
Beaucoup disent que la solution, c’est votre départ. L’avez-vous vous-même envisagé ?
Partout dans le monde, un chef d’Etat arrive au pouvoir par un mécanisme constitutionnel et le quitte par le même mécanisme. Un président ne peut ni s’imposer ni quitter le pouvoir par le chaos. La preuve tangible, ce sont les conséquences de la politique française en Libye avec la décision d’attaquer Kadhafi. Quel en a été le résultat ? Après son départ, il y a eu le chaos. Son départ était-il la solution ? La situation s’est-elle améliorée ? La Libye est-elle devenue démocratique ? L’Etat est comme un navire : dans la tempête, le capitaine ne prend pas la fuite. Il ne quitte pas le bord. Si les passagers doivent s’en aller, alors il sera le dernier à partir.
Cela veut dire que le capitaine est prêt à mourir. Vous avez évoqué Mouammar Kadhafi. Est-ce que vous avez peur de mourir de la même façon que Saddam Hussein ou Kadhafi ?
Le capitaine ne pense pas à la mort, ni à la vie. Il pense à sauver son navire. S’il fait naufrage, tout le monde mourra. Il vaut donc mieux tout faire pour sauver son pays. Mais je voudrais souligner une chose importante. Mon but n’est pas de rester président, ni avant, ni pendant, ni après la crise. Mais quoi qu’il arrive, nous autres Syriens n’accepterons jamais que notre pays devienne un jouet entre les mains de l’Occident. C’est un principe fondamental pour nous.
Parlons du groupe Etat islamique. On entend dire parfois que, au départ, le régime syrien a encouragé la montée des radicaux islamistes pour diviser l’opposition. Que répondez-vous ?
D’abord, en Syrie, nous avons un Etat, pas un régime. Soyons clairs sur la terminologie. Si nous supposons que cela est vrai, et donc que nous avons soutenu l’Etat islamique, cela revient à dire que nous leur avons demandé de nous attaquer, d’attaquer nos aéroports militaires, de tuer des centaines de nos militaires, d’occuper nos villes et nos villages. Où est la logique là-dedans ? Qu’avions-nous à gagner dans tout cela ? Diviser et affaiblir l’opposition, comme vous le dites ? Nous n’avions pas besoin de le faire. L’Occident lui-même reconnaît que cette opposition était fantoche. C’est ce qu’Obama lui-même a dit. L’hypothèse est donc fausse. Mais alors, où est la vérité ? En réalité, l’Etat islamique a été créé en Irak en 2006. Ce sont bien les Etats-Unis et non la Syrie qui occupaient l’Irak. Abou Bakr Al-Baghdadi était dans les geôles américaines et non dans les prisons syriennes. Qui a donc créé l’Etat islamique ? La Syrie ou les Etats-Unis ?
Les Syriens que nous rencontrons à Damas font plus allusion aux cellules dormantes djihadistes en Occident qu’à la guerre contre l’Etat islamique. C’est étonnant, non ?
Le terrorisme est une idéologie et non une organisation ou une structure. Or, l’idéologie ne connaît pas de frontières. Il y a vingt ans, le terrorisme s’exportait depuis notre région, en particulier depuis les pays du Golfe, comme l’Arabie saoudite. A présent, il nous vient d’Europe, et notamment de France. Le plus gros contingent de terroristes occidentaux venus en Syrie est français. Ils commettent des attentats en France. En Belgique, ils ont attaqué le musée juif. Le terrorisme en Europe n’est plus dormant, il s’est réveillé.
Les Américains sont aujourd’hui, contre l’Etat islamique, des alliés tactiques. Considérez-vous toujours leur intervention comme une violation du territoire syrien ?
Vous avez utilisé le mot “tactique”, et c’est là un point important. Vous savez bien qu’une tactique n’a aucun sens sans une stratégie. Car elle seule n’arrivera pas à venir à bout du terrorisme. Il s’agit d’une intervention illégale, d’abord parce qu’elle n’a pas reçu l’approbation du Conseil de sécurité, ensuite parce qu’elle n’a pas tenu compte de la souveraineté d’un Etat, qui est la Syrie. La réponse est oui. C’est une intervention illégale et donc une violation de la souveraineté nationale.
L’AFP rapporte que votre aviation a effectué 2 000 sorties aériennes en moins de quarante jours, ce qui est énorme. Quand vos avions croisent ceux des Américains, par exemple en allant bombarder Raqqa, existe-t-il un protocole de non-agression ?
Il n’y a pas de coordination directe. Nous attaquons le terrorisme là où il se trouve, sans prendre en considération ce que font les Etats-Unis ou la coalition. Vous seriez sans doute surpris -d’apprendre que le nombre quotidien de sorties de l’aviation syrienne pour frapper les terroristes est supérieur à celui de la coalition. Donc, d’abord, il n’y a pas de coordination. Ensuite, les frappes de la coalition ne sont que cosmétiques.
Mais ces frappes-là vous aident. La démission du secrétaire américain à la Défense, Chuck Hagel, s’explique en partie parce qu’il pensait qu’elles renforçaient votre gouvernement et vos positions.
Notez que votre question contredit celle dans laquelle nous sommes accusés de soutenir Daech. Ça veut dire plutôt que nous sommes des ennemis de Daech.
J’ai dit qu’on entend qu’au départ vous avez soutenu Daech pour diviser l’opposition.
Je ne vous accuse pas, je fais plutôt allusion à ceux qui le pensent.
Maintenant, une des conséquences est cette démission, du point de vue américain. Estimez-vous quand même que les frappes de la coalition vous aident ? 
On ne peut pas mettre fin au terrorisme par des frappes aériennes. Des forces terrestres qui connaissent la géographie et agissent en même temps sont indispensables. C’est la raison pour laquelle il n’y a pas eu de résultats réels après deux mois de campagnes menées par la coalition. Ce n’est donc pas vrai que les frappes de la coalition nous aident. Elles nous auraient certainement aidés si elles étaient sérieuses et efficaces. C’est nous qui menons les combats terrestres contre Daech et nous n’avons constaté aucun changement, surtout que la Turquie apporte toujours un soutien direct dans ces régions.
Le 14 juillet 2008, vous étiez à la tribune, sur les Champs-Elysées, en marge du sommet pour la Méditerranée. Aujourd’hui, le gouvernement français vous considère comme un paria. Comment vivez-vous cette situation ?
Les bonnes relations entre 2008 et 2011 n’étaient pas le résultat d’une initiative française. Il y a eu d’abord les Américains qui ont chargé l’administration française, à l’époque, de faire pression sur la Syrie au sujet de l’Iran. Il y a eu ensuite le Qatar qui poussait la France à améliorer ses relations avec la Syrie. Entretenir de bonnes relations avec nous n’émanait donc pas d’une volonté indépendante de la France. Aujourd’hui, les choses n’ont pas changé. Hollande, comme Sarkozy, n’agit pas de son propre gré.
François Hollande continue de vous considérer comme un adversaire. Pensez-vous qu’à un moment le contact pourra être renoué ?
Ce n’est pas une question de relations personnelles. D’ailleurs, je ne le connais même pas. Il s’agit de relations entre Etats et institutions et dans l’intérêt des deux peuples. Nous traiterons avec tout responsable ou gouvernement français dans l’intérêt commun. Mais l’administration actuelle œuvre à l’encontre des intérêts de notre peuple et de ceux du peuple français. Je ne suis ni l’ennemi personnel ni le rival de Hollande. Je pense que c’est plutôt Daech qui est son rival, puisque leurs cotes de popularité sont très proches.
Oui ou non, y a-t-il aujourd’hui en Syrie des armes chimiques ? 
Non, nous l’avons très clairement déclaré. Et lorsque nous avons décidé de renoncer aux armes chimiques, c’était de manière définitive et totale.
Pourtant, le secrétaire d’Etat américain John Kerry vous accuse d’avoir violé le traité en faisant usage de chlore. Est-ce vrai ?
Vous pouvez trouver du chlore dans n’importe quel foyer syrien. N’importe quelle faction peut l’utiliser. Mais nous, nous ne l’avons pas utilisé, car nous avons des armes conventionnelles plus efficaces, que nous employons dans notre guerre contre les terroristes. Nous ne le cachons pas, car c’est notre droit. Ces accusations ne nous surprennent pas. D’ailleurs, depuis quand les Américains disent-ils la vérité à propos de la crise syrienne ?
Avez-vous utilisé des armes chimiques ?
Nous n’avons pas utilisé ce genre d’armes. Autrement, il y aurait eu des dizaines de morts, sinon des centaines de milliers, et pas simplement 100 ou 200, comme on l’a dit l’année dernière, surtout dans des régions peuplées de centaines de milliers, voire de millions de Syriens.
A l’occasion de votre dernier séjour à Paris, fin 2010, j’avais interviewé votre femme, Asma. Est-ce que ça vous manque de ne plus pouvoir voyager hors de vos frontières ?
Je ne suis pas amateur de voyages et mes visites n’étaient pas pour faire du tourisme. Ce qui me manque vraiment, c’est la Syrie telle qu’elle était. Ce qui nous manque, bien sûr, c’est un monde différent où règnent des relations logiques et morales. Nous avions à l’époque de grands espoirs de développer notre région, de lui assurer une plus grande ouverture intellectuellement. Nous pensions que la France était, par son patrimoine culturel, la mieux placée pour jouer ce rôle avec la Syrie au Moyen-Orient.
Votre épouse se voyait comme une ambassadrice de la modernité. Comment vit-elle cette situation, maintenant qu’elle est recluse en Syrie ?
Comme tous les Syriens, comme moi, elle éprouve de la douleur devant la destruction et le sang versé. Cela nous peine de voir notre patrie revenir des décennies en arrière et devenir un foyer de terrorisme après avoir été parmi les cinq premiers pays sur le plan de la sécurité. Tous les deux, nous sommes navrés de voir l’Occident, qu’on croyait capable d’aider à l’ouverture et au développement, prendre la direction inverse. Pire encore, nous déplorons que ses alliés soient des pays moyenâgeux du Golfe, comme l’Arabie saoudite et le Qatar.
On vous décrit comme quelqu’un d’extrêmement proche de ses enfants. Le soir, en rentrant chez vous, comment leur expliquez-vous ce qui se passe dans votre pays ?
Ce dialogue se déroule dans chaque foyer syrien. Le plus difficile est lorsqu’on a affaire à des enfants dont la conscience sociale s’est formée durant la crise. Les deux principales questions qu’ils posent sont les suivantes : comment des gens qui croient ou disent défendre Dieu et l’islam peuvent-ils tuer et décapiter ? C’est une contradiction difficile à expliquer. Les enfants demandent aussi si ces gens-là savent qu’ils se trompent. La réponse est que certains le savent et exploitent la religion à des fins parti-culières ; d’autres sont des ignorants, qui ne savent pas que la religion, c’est le bien et non le meurtre. Ils nous posent une dernière question : “Pourquoi l’Occident nous attaque-t-il et soutient-il les terroristes ?” Ils ne parlent pas de l’Occident en tant que tel, mais évoquent des pays précis comme les Etats-Unis, la France, la Grande-Bretagne. “Pourquoi agissent-ils de la sorte ? Est-ce qu’on leur a fait du mal ?” Nous leur expliquons alors que les peuples, c’est une chose, et que les Etats, c’en est une autre.

Le Pape entre vérité et diplomatie

Le Pape entre vérité et diplomatie

Global Research, décembre 02, 2014
« Aujourd’hui on dit que beaucoup de choses ne peuvent pas se faire parce que l’argent manque. Et pourtant on trouve de l’argent pour acheter des armes, on en trouve pour faire les guerres » : cette affirmation du Pape François a été ignorée par les milieux gouvernementaux italiens et occidentaux, qui taisent le fait que la dépense militaires mondiale (environ 1750 milliards de dollars annuels selon le Sipri) est entraînée par celle des USA/Otan (plus de 1000 milliards de dollars annuels, plus d’autres dépenses à caractère militaire).
Pratiquement ignorée, dans ces mêmes milieux, l’affirmation du Pape qui sonne indirectement comme une critique au système capitaliste : « Nous sommes en train de vivre une troisième guerre mondiale par morceaux, par chapitres », derrière laquelle se trouvent des problèmes politiques et économiques corrélés à la tentative de « sauver ce système où le Dieu argent est au centre ».
Un relief particulier a par contre été donné, à Rome et dans les autres capitales occidentales, au fait que le Pape, arrivé à Ankara, a exprimé son appréciation pour « le rôle important de la Turquie dans l’aire moyen-orientale, en en soulignant notamment l’engagement humanitaire pour l’accueil des réfugiés fuyant les zones de conflit » (L’Osservatore Romano, 28 novembre). Le Pape avait fait pareil quand, à Amman, il avait remercié le royaume jordanien pour « le généreux accueil fait aux réfugiés irakiens et provenant d’autres zones de crise, en particulier de la Syrie voisine, emportée par un conflit qui dure depuis trop longtemps », en encourageant la Jordanie à « continuer à s’engager dans la recherche de la paix désirée pour toute la région » (L’Osservatore Romano, 24 mai).
Ces déclarations qui font les louanges (probablement sur la base d’un calcul diplomatique) du rôle de la Turquie et de la Jordanie dans la région moyen-orientale et de leur engagement en faveur de réfugiés, se prêtent à être un instrument utile dans la campagne conduite par les gouvernements et par les médias occidentaux pour mystifier la réalité. Ce n’est pas un hasard si le président Napolitano, dans son message à la veille du départ du Pape pour la Turquie, souligne « le rôle crucial qu’Ankara est appelé à jouer dans une région secouée par de fortes tensions et de sanglants conflits ».
En réalité la Turquie et la Jordanie constituent les avant-postes de l’opération guerrière USA/Otan, dont le vrai objectif n’est pas la destruction de l’Emirat islamique, fonctionnel à cette stratégie, mais la démolition de l’Etat syrien (après le yougoslave et le libyen), la reconquête de l’Irak (éventuellement en le démembrant pour pouvoir mieux le contrôler) et en perspective l’attaque de l’Iran. Comme le documentent aussi des enquêtes du New York Times et du Guardian, en Turquie et en Jordanie la Cia a ouvert des centres de formation militaire où sont entraînés des groupes islamiques (auparavant définis comme terroristes par Washington) provenant d’Afghanistan, de Libye et d’autres pays, à infiltrer en Syrie ; y compris les groupes qui ont formé l’EI en Syrie, avant de lancer l’offensive en Irak. Les armes arrivent surtout via l’Arabie Saoudite et le Qatar. En Turquie -où l’Otan a plus de vingt bases aériennes, navales et d’espionnage électronique- a été transféré le Landcom, le commandement allié des forces terrestres des 28 pays membres de l’Otan, y compris donc des forces turques ; il a été activé à Smyrne, d’où il dirige les opérations en Syrie et en Irak. En Jordanie -d’après l’Associated Press (28 novembre)- ont été formées, dans un programme Cia d’entraînement de deux années, les forces rebelles appuyées par les Etats-Unis qui opèrent conjointement avec la branche d’Al Qaeda en Syrie. En provoquant d’autres vagues de réfugiés qui bénéficieront du « généreux accueil » de la Turquie et de la Jordanie.
 Manlio Dinucci
Géographe et journaliste
Edition de mardi 2 décembre 2014 de il manifesto
Traduit de l’italien par Marie-Ange Patrizio

Saturday, October 18, 2014

Flash ! Les rapaces sont de retour dans les rues africaines!

Flash ! Les rapaces sont de retour dans les rues africaines!

Global Research, juillet 31, 2014
« Le XXIe siècle sera influencé par ce qui se passera non seulement à Rome ou à Moscou ou à Washington, mais aussi en Afrique. C’est la simple vérité d’une époque où nos connexions font disparaître les frontières entre les peuples. »
Barak Obama à Ghana, le 11 juillet 2009
Depuis quelques années, plus exactement au début du 21ème  siècle, l’Afrique soudainement refait surface dans les médias de tous les pays riches de l’Occident. Cette fois-ci, le mobile n’est plus autour de l’aide pour combattre le SIDA,  ou  « blood diamond »,  la faim, la sécheresse et autres fléaux que la grande presse impériale  utilise inlassablement pour définir toute une race d’hommes et de femmes. À présent, on parle de préférence du vaste  marché africain. Les Chinois furent les premiers à se précipiter vers « la ruée vers l’or ». À un point tel que certains le qualifie de conquête chinoise, en fait une véritable bousculade dans les rues africaines à la recherche aveugle du profit. L’occident traditionnel proteste et contre-attaque. L’Afrique est à sa deuxième reconquête brutale. L’Africain est confus !
En octobre l’an 2000, s’était tenu la première grande conférence interministérielle sino-africaine à Beijing, Chine.  Le forum  a été rehaussé de la présence des deux plus grandes  personnalités politiques du régime de l’époque, dont le président  Jiang Zemin, le vice-président Hu Jintao et une pléiade de chefs d’État, de gouvernements et de ministres. Pékin dépensa une fortune à l’occasion de la réalisation de ce projet qui allait donner naissance à une puissante organisation d’échange du nom de « Forum China-Africa  coopération », ayant pour sigle FOCAC.
De l’an 2000 à 2012, 5 sommets furent organisés, soit un sommet tous les 3 ans, pour renforcer l’organisation, multiplier ses actions et renforcer ses structures à travers tous les pays Africains. D’ailleurs, la coopération sino-africaine a presque vu ses avoirs doubler, de 5 billions en 2006 à 10 billions en 2010, sous formes de prêts et de dons.  L’objectif de la FOCAC est « de renforcer les échanges et étendre la coopération dans une dynamique pragmatique. Et, promouvoir le dialogue politique et coopération économique tout en cherchant à s’entraider et coopérer mutuellement ».
Depuis lors, les états occidentaux qui font traditionnellement « main basse » sur le continent ont commencé à présenter  visiblement  des signes d’agacement. En particulier, les Etats-Unis d’Amérique. Jusqu’en 2009, les États-Unis furent le plus grand partenaire commercial de l’Afrique avant de se faire buter  le cul par la Chine. Aujourd’hui, cette dernière a investi plus de 215 billions de dollars dans tous les domaines : économiques, financiers,  touchant de plein fouet des pays comme l’Angola, le Zimbabwe, le Soudan, sous la baguette de 300 compagnies majoritairement venues du gouvernement chinois. L’occident a peur.
L’Afrique, encore une fois va  sauver l’occident et l’humanité d’une crise économique et financière sans précédent, comme ce fut le cas au 15ème  siècle. C’est la visée des rapaces. L’Afrique est perçue comme le poumon de l’humanité à cause du sous-développement industriel. On la voit surtout comme la nouvelle panacée  à reconquérir, et ceci de façon précipitée. Si au 15ème  siècle il y avait eu seulement des rapaces  européens, de nos jours il y a les Étasuniens et surtout les chinois. Eux,  que les occidentaux considèrent comme des lutins, en pointant du doigt l’agressivité et le pragmatisme avec lesquels ils opèrent.
Comme les Français, les Anglais, les Étasuniens…les Chinois sont tout aussi des rapaces. Ils investissent les lieux et occupent les terres. Donc, le continent est sur le point de vivre un autre pillage encore plus sévère que celui de  l’esclavage, vue l’engouement et le nombre de voraces.
Rappelons que l’esclavage, comme catastrophe humaine,  a fait plus de 15 millions de victimes, strictement dans le continent Africain, sans mentionner les filières sahariennes et Arabes, à un moment où la population mondiale était estimée à 500.000.000 d’habitants.
Aujourd’hui, à lui seul, le continent africain a une population estimée à 1 milliard d’âmes et, on prévoit un accroissement exponentiel  de 2 milliards en 2050 et de 4 milliards de personnes en moins d’un siècle. De façon contradictoire l’Occident est stagnant ou marche  à reculons sur le plan démographique.
Il y a un autre aspect qui mérite d’être pris en compte aussi, même quand il n’est pas d’actualité. Dans les années d’avant 1960, trois institutions contrôlaient les citoyens des pays occidentaux: la famille (père et mère), l’école (instituteurs et professeurs) et les prédicateurs (catholiques et protestants). A partir de l’assassinat de John Kennedy, en Novembre 1963, dont tous les détails ont été suivis à la télé, par tout un pays, en direct, jusqu’aux funérailles . Les parents, éducateurs et prédicateurs s’étaient fait piteusement remplacés par la télévision. D’où la naissance d’une « génération super star », c’est-à-dire qui vit au rythme des vedettes de la télévision, du sport, du cinéma et de la musique.  Une descendance individualiste et ingrate. Ce qui a marqué un tournant historique qui allait prendre plusieurs formes, dont la stérilité. L’Occident ne peuple plus. On dirait une affinité: « Autant une nation devient plus riche, autant elle peuple moins ». De là intervient la notion de l’immigration, où les populations des pays pauvres se sont expatriés à la recherche des biens volés par les « colons ». Cette fois, nous allons constater à une autre forte forme d’immigration, celle de l’occident vers l’Afrique, ou la richesse est sécurisée ou la pollution n’est pas aussi étendue. D’où la particularité de cette deuxième « ruée vers l’Afrique ».
Si au 15ème  et 16ème  siècle, les Européens s’entendirent pour coloniser les pays africains, on n’a pas la garantie qu’on parviendra à un accord pareil au 21ème  siècle, car les ” peaux jaunes ” se sont invités de la partie. Ils sont confiants, ambitieux, orgueilleux et puissants. De ce fait, il est fort probable qu’on revive les anciennes méthodes de la guerre-froide à l’intérieur des frontières africaines. Qui plus est, une reconfiguration sur mesure de l’espace géographique africain en fonction des méandres des puissants. Ou, la guerre meurtrière, tout court.                                                                                                             Sans vouloir me verser dans le cynisme ou la démagogie, l’Afrique sera peut-être le catalyseur inconscient et involontaire de la 3ème  guerre mondiale:  la plus effroyable et la plus sanguinaire des guerres, car les enjeux sont de taille.
Les projections sont très  sombres. Les Occidentaux, en tête les Etats-Unis d’Amérique, dénoncent « l’invasion chinoise » en Afrique. Effectivement, ils sont plus de 200.000 à prendre résidence sur le continent.  Ce qui inspire de l’effroi. Ils se renforcent diplomatiquement et culturellement. 18.000 bourses d’études sont à la portée des africains pour étudier en Chine, plus de 30.000 reçoivent des formations de base, tout cela pendant une période de deux ans. Les deux parties cherchent à renforcer leurs coopérations.
Jusqu’à présent,  les Chinois n’expriment aucune velléité soutenue de s’immiscer dans les affaires politiques des pays où ils sont présents. Mais, pour combien de temps cette « politique apolitique » va-t-elle tenir ? French Howard, un ancien correspondant du « New York Times » pour l’Afrique, dans une interview accordée au « Newyorker » a opiné de cette façon : « LesCchinois sont apolitiques dans le sens qu’ils ne sont porteurs d’aucun projet axé sur un système de valeur (chinois), qu’ils tentent d’imposer dans les pays où ils en sont opération. Cependant, ils sont politiques en termes de stratégies adoptées conformément à la réalité de chaque pays africain (…) ».  Ce que Howard French a négligé de mentionner, c’est que les Chinois pratiquent « l’art de la guerre » de Sun Tzu. L’économie et les finances d’abord, la politique ensuite. C’est-à-dire, laisser les Occidentaux s’empêtrer dans des conflits armés et religieux sans issus, tels que : coup d’état, génocide à la rwandaise, autant que possible, détruisant ainsi davantage leur crédibilité et leur position morale. Le Chinois s’imposera alors comme l’alternative du moment, en temps et lieu.
Les Chinois ne sont pas dans les rues africaines scandant des slogans maoïstes, ils travaillent avec d’autres objectifs. Profitant de ses succès économiques perceptibles, le régime chinois entend exploiter au maximum cette « manière de voir » son pays dans le monde. Pratiquement, la transition chinoise est réussie. Si on fait exception de la tache  liée au  « massacre de Tiananmen » en 1989, on peut dire que Deng Zao Ping a fait école. Tous les dirigeants d’après s’inspirent des idées de ce dernier. La Chine est en conquête. Les consignes des stratèges chinois sont simples. Sur le terrain, ils n’affrontent pas, ils sont mobiles et extrêmement rapides et tendent à s’unir aux africains comme «  le poisson dans l’eau ». Ils avancent des pions jour et nuit. L’Afrique fait partie de cette stratégie globale de s’imposer comme le nouvel empire mondial.
« La période des chevauchées permanentes » refait surface comme doctrine de domination économique, politique, militaire et culturelle. Les victimes d’hier, sont les victimes d’aujourd’hui. D’où l’importance d’une « démarche mémorielle »  pour contrecarrer la campagne psychologique impériale de reconquête africaine. Certains estiment qu’il est impossible de recoloniser le continent africain et imposer l’esclavage comme idéologie et mode de gouvernement. Ces penseurs oublient que le colonialisme n’a jamais été arrêté à aucun moment de l’histoire. Il a été reproduit en fonction d’un « colonialisme pour notre temps », ce qu’on appelle couramment le néocolonialisme. Au contraire, le colonialisme a dépassé les limites raciales pour devenir une affaire de classe,  se démarquant ainsi de la dimension nationale. Aujourd’hui, il est au service de quelques familles multinationales. D’où la grande complexité à cerner  cette réalité .
Le peuple africain, sorti de la dépendance directe de l’Europe, au cours des années 1960, est victime de ce qu’Antonio Gramsci a qualifié de « fausse conscience ». Le fait que les habitants des pays africains n’ont pas pu arriver à former une « conscience africaine », qui aurait donné lieu à une « pensée africaine », aujourd’hui se manifeste une ambiguïté teintée de confusion par rapport à ce sujet d’importance capitale qu’est la « reconquête africaine ». On a fait ce même constat partout, les peuples se désintéressent   des problèmes majeurs qui menacent l’existence humaine, tel que le réchauffement de la planète. Cette attitude est le résultat de «  l’hégémonie culturelle » impérialiste, c’est-à-dire les médias, le système scolaire, la religion, pour ne citer que ceux-là. Au lieu de s’unir pour se défendre contre cette nouvelle reconquête, dirigeants politiques et intellectuels africains se battent entre eux. Premièrement, à l’intérieur d’un même espace géographique ou intra-étatique, sous forme de coup d’état, d’insurrection populaire, lutte armée. Deuxièmement, au niveau interétatique, l’Africain s’affronte en se déstabilisant l’un, l’autre. Les deux stratégies sont conceptualisées dans des laboratoires de pensée impérialiste pour asseoir en permanence leur autorité exclusive. Les élites « nationales », foudroyées dans des échanges techniques et culturels avec l’Occident, n’arrivent pas à compléter leurs missions historiques de « mémoire » du continent. Finalement, nous avons au pouvoir des présidents comme Laurent Gbagbo qui finance les élections de Jacques Chirac, président français,  à coup de 3 millions de dollars. L’Africain défend les intérêts de l’oppresseur.
Si bien que le sénat français, par l’intermédiaire de la commission des affaires étrangères/de la défense et des forces armées,  a publié un rapport de 500 pages dactylographiées sur les relations France/Afrique, dans lequel de nombreuses réflexions et propositions ont été faites à la nation, au pouvoir public. Dans cet important document, qui se présente comme un projet sociétal pour le continent africain à travers une vision de la politique extérieure française, les rédacteurs font montre d’un réalisme temporel frémissant lorsqu’ils invitent à, et je cite : « Se départir des préventions postcoloniales et assumer le fait que l’Afrique n’est pas seulement partie prenante de notre histoire, mais aussi un élément clé de notre avenir ».   Le sénat français a insisté sur le retard accumulé par la politique française. Et met en garde pas seulement contre la Chine, « le démon rouge », mais aussi contre les autres pays émergeants, notamment le Brésil, qui sous la direction de l’ancien président Lula, a fait « une percée louverturienne » en Afrique. Encore une fois, l’avenir c’est l’Afrique.
Cependant, je ne constate pas encore le sursaut africain indispensable pour éviter une autre hécatombe. Il faut réaliser que tous les pays occidentaux, la Chine et les autres pays émergeants présentent une vision globale de l’Afrique. Cette dernière n’est pas prise sous forme morcelante de nationalités. Cela nous mène à la vision globale du « guide libyen » qui rêvait d’un gouvernement unique pour l’Afrique, Mouammar Kadhafi et bien avant lui, Kwameh Nkrumah du Ghana. Cela signifie que la résistance africaine doit être continentale. Aucun pays ne survivra seul l’assaut des rapaces. D’où la nécessité pour les États africains de se mettre ensemble pour présenter  un  front commun à travers une vision historique mémorielle et actuelle. C’est possible, parce que de l’Afrique du sud à la Tunisie, de l’Algérie au Mozambique, les problèmes que confrontent les peuples sont les mêmes. Donc, il est faisable d’imposer cette « pensée africaine » aux rapaces.
Nous sommes à la veille de grandes transformations mondiales. Le système imposé par l’impérialisme n’est plus acceptable. Les fissures sont internes et, il n’y a pas de solution réelle.  Dans sa quête de le rafistoler, l’Afrique doit être immolée pour une seconde fois.
Aujourd’hui il y a plus de rapaces, il est impossible de satisfaire tous ces appétits. La confrontation parait inévitable entre les anciens et les nouveaux colons. Seule une société civile robuste en Afrique et ailleurs dans le monde peut contraindre à l’échec ces froids calculs mercantilistes. Encore une fois et comme toujours, les peuples restent les maitres de leurs destins. Ce qui se passera en Afrique va définir la nouvelle civilisation que John Lennon a décrit dans « Imagine ».
Joël Léon


Livres/articles/rapports consultés :
1-les veines ouvertes de l’Amerique Latine (Eduardo Galeano)
2-The trans-atlantic slave database ( David Eltis)
3-financial times-Africa
4-“china in Africa: the new imperialist”, New Yorker (Alexis Okeowo)
5-Kurzbeitrage Reports: Henning Melber
6-Brookings –Africa
7-FOCAC-Forum China-Africa cooperation
8-“Little to fear but fear itself”. The economist
9-Startistic sur les investissements chinois-IMF
10-Chinese Investment in Africa : Checking the facts (Katarina Kobylinski)
11-Academia.edu
12-How China is taking over Africa-USA Today (Jacob Kushner)
13-United nations, department of economic and social affairs (2013)
14-Rapport d’information de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées –France (2013-2014)
15-Death of the west (Pat Buchanan)





Des avocats somment les parlements des Etats-Unis, du Canada, de la France et d’Haïti d’investiguer l’ancien président Bill Clinton

Des avocats somment les parlements des Etats-Unis, du Canada, de la France et d’Haïti d’investiguer l’ancien président Bill Clinton

Global Research, octobre 14, 2014
On se souvient encore des images sombres et désespérées de CNN sur le tremblement de terre du 12 Janvier 2010 en Haïti. Elles ont fait le tour du monde. Anderson Cooper  immortalisa en images audio-visuelles le malheur de tout un peuple. Les conséquences ne se firent pas attendre, des milliards de dollars furent recueillis mondialement. Les citoyens de tous les pays traduisirent leurs chagrins en dollars. Les Etats-Unis en tête, avec une contribution colossale dépassant toute prévision, soit 1.4 milliard de dollars. Encore une fois, le peuple américain a démontré sa grande humanité,  trop souvent éclipsée par les actions de leur gouvernement dans le monde.
Tout semblait prêt et en ordre pour définitivement reconstruire Haïti. Ce pays méconnu et incompris.  Le capital était là, soit 9.5 milliards de dollars. L’espoir galvanisait les esprits. L’émotion était à son point culminant. L’espoir renaissait en Haïti au rythme des promesses internationales. Encore une fois, il fallut écarter le gouvernement haïtien. On dit trop « corrompu », quoique parachuté au pouvoir par ceux-là mêmes qui l’ont parrainé, les Clinton. Ces derniers, pour l’histoire et la vérité, ont placé le président actuel au pouvoir, Michel Martelly, de qui, l’ancien président américain a reçu la plus grande distinction nationale d’Haïti au mois de Juillet 2011. En effet, Clinton a été décoré de l’Ordre national Honneur et Mérite au grade Grand Croix plaque or, pour « services rendus ». Peu de temps après, il s’est laissé photographier sans aucune gêne avec l’ancien dictateur haïtien : Jean-Claude Duvalier, l’assassin de plus de 30.000 Haïtiens.
Le 19 mai 2009, le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki Moon nomma Bill Clinton comme son envoyé spécial en Haïti, avec comme objectif d’aider Haïti à se développer. Pour l’histoire, en Octobre 1994, il avait facilité le retour au pouvoir du président Jean B. Aristide après un coup d’état sanglant qui avait fait plus de 5.000 morts pendant une période de 3 ans. Coup d’état dans lequel la « CIA » a été directement impliquée comme instigatrice en 1991, puis en 2004. Donc, Clinton connait bien les circuits des crises successives d’Haïti. En janvier 2010, a eu l’apocalyptique tremblement de terre, laissant derrière lui 250.000 cadavres, 300.000 blessés et 1.5 million de sinistrés sans abris. Donc, automatiquement Bill était devenu le candidat idéal pour être placé au chevet d’Haïti. Toujours dans la perception du maitre blanc !
Au mois de mars 2010, le gouvernement haïtien et la communauté internationale fondèrent le « Fond pour la reconstruction d’Haïti », co-présidé par Bill Clinton et l’ancien premier ministre haïtien, Jean Max Bellerive. L’objectif, comme le nom l’indique, était de reconstruire Haïti. Tous les états furent appelés en la circonstance à travers des symposiums organisés un peu partout dans le monde pour ramasser des fonds. Ainsi, 9.5 milliards de dollars ont été promis et devaient être mobilisés sur une période de 5 ans pour reconstruire la capitale dévastée, par ricochet le pays tout entier. 3 ans et demi après, ou en sommes-nous avec l’humanitaire?
Je ne vais pas m’attarder sur l’érosion des résultats de cette entreprise mafieuse qu’est l’humanitaire. Toute personne avisée s’attendait à un échec patent en Haïti. Ce qui m’intéresse aujourd’hui, c’est qu’encore une fois, Haïti met à nu le désordre qui marque ce milieu, dit humanitaire et qui doit être contrôlé. Les avocats : Newton Sain-Juste et André Michel, se sont engagés courageusement à porter l’échec de la reconstruction d’Haïti par devant les institutions étatiques des Etats-Unis d’Amérique, du Canada et de la France, les trois pays qui ont le plus investi dans le processus de « reconstruction », le peuple américain a contribué 1.4 milliard de dollars à lui seul. Ainsi le 14 avril de cette année, les deux  avocats avaient publié des lettres dans la presse qu’ils avaient envoyées à la « Cour Supérieure des Comptes » (tribunal financier haïtien) et aux parlementaires des Etats-Unis : Patrick Leahy et John Boehner ; Andrew Scheer de la chambre des communes du Canada ; Jean Pierre Bel et Claude Bartolone du parlement français.
Dans ces correspondances, les avocats haïtiens exigent de ces 3 pays d’investiguer l’emploi des fonds alloués à l’ancien président Bill Clinton pour reconstruire Haïti. Et, ils ont demandé aussi à la Cour supérieure des comptes haïtienne de demander des comptes à Bill aussi, conformément  « à la loi du 15 Avril 2010 portant modification de la loi du 9 septembre 2008 sur l’état d’urgence prévoyant la juridiction de la cour supérieure des comptes et du contentieux administratif et faisant de lui ( Bill Clinton) un fonctionnaire haïtien assujetti à la reddition de compte conformément aux lois haïtiennes ».              Déjà, il y a eu une délégation canadienne de « York University » qui a séjourné dans le pays. L’objectif de cette visite fut de « se renseigner sur place des résultats de l’Aide massive de la Communauté Internationale et notamment, celle du Canada, mobilisée en Haïti après le 12 janvier 2010 ». Cela concerne aussi l’organisation d’un «  Symposium sur la Démocratie et l’Aide de la Communauté Internationale en Haïti qui sera organisé à Toronto à partir du 17 octobre 2014 » et «  doit conduire cette délégation dès ce mercredi 3 septembre 2014 aux Nations-Unies et au Congrès américain pour exposer la situation d’Haïti plus de 4 ans après le séisme du 12 janvier. »
Dans une conversation téléphonique avec l’avocat haïtien, Maitre Newton Saint-Juste, l’un des instigateurs des plaintes contre le sieur Bill Clinton au sujet de sa gestion de l’aide internationale, m’a fait comprendre que les gouvernements, américains et canadiens, auraient exercé des pressions sur la délégation canadienne pour ne pas venir en Haïti, via l’ancienne gouverneure du Canada, Mme Michaelle Jean. Prétextant l’instabilité et le crime qui sont « monnaie courante » en Haïti. Entretemps, d’après une étude publiée par « Gallup », Haïti est classée en 10e position en matière d’insécurité dans l’hémisphère américain, loin derrière la république dominicaine qui se classe en 5eposition. Pourtant on encourage les ressortissants étrangers à visiter ces pays.
Finalement, la délégation a pu entrer en Haïti et entreprendre un travail d’investigation nécessaire. Mais l’ambiance n’était pas tout à fait sereine, car les autorités canadiennes en Haïti sembleraient vouloir limiter les contacts de la délégation uniquement aux responsables de l’exécutif et législatif. Heureusement, les membres de la délégation avaient pu rencontrer le secteur des droits de l’homme, dont Mr Pierre Esperance, les avocats Newton Saint-Juste et André Michel. Et ceci, malgré les désaccords des fonctionnaires de l’ambassade du Canada en Haïti. D’après certaines sources, l’administration du premier ministre canadien Harper, a même téléphoné à l’ambassadeur pour passer des instructions en ce sens, c’est-à-dire dissuader les membres de la délégation de visiter des sites importantes liés à l’investigation.
L’avocat Newton Saint Juste a poursuivi, répondant à ma question, que son engagement à faire la lumière sur les 9.5 milliards de dollars gaspillés  en Haïti, entre dans le cadre d’un processus large qui dépasse les limites géographiques d’Haïti. Mais pour tous les gens qui croupissent dans la misère, ces énormes sommes d’argent versées par des contribuables étrangers pouvaient faire une différence notable dans la vie de millions d’hommes, femmes et enfants. Ce qui renforce la perception de Raoul Peck, , lorsqu’il a déclaré dans le journal Le monde, et je cite : «  Dans le business de l’humanitaire, chacun plante son drapeau. La dictature de l’aide est violente et arbitraire ».
A travers Newton Saint-Juste et André Michel, c’est le procès de toute une pratique mafieuse qui est en cours. C’est aussi une démarche pour rétablir la vérité contre le mensonge et l’hypocrisie, et un appel à la vigilance citoyenne aux peuples du monde entier. Raoul Peck poursuit pour rappeler que « Lorsque les Etats-Unis annoncent de donner 2,5 milliards de dollars, il faut refaire le calcul”, il dit encore que “Les grandes banques prélèvent déjà 8 % de cette somme pour leurs frais de gestion, et 800 millions de dollars servent à payer les dépenses des 20 000 militaires que personne n’a appelés ».
Voici le danger dans toute cette affaire : la perception que 10 millions d’âmes d’Haïti ont reçu près de 10 milliards de dollars d’aide internationale, et malgré tout on n’arrive pas à transformer leur condition de vie. Ce qui constitue une déception morale profonde pour le peuple receveur et un découragement certain chez les peuples donneurs. Et, ceci envoie un signal de « cas perdu » à l’ensemble du monde par rapport à ce peuple victime. Ce qui est dangereux et attentatoire, c’est la perception persistante d’un peuple maudit qui se diffuse dans le subconscient du monde par rapport à un peuple donné. D’où le slogan d’état paria.
Les faits sont là. Des milliers d’Haïtiens vivent encore sous des tentes 4 ans après le séisme. Des camps furent été évacués par la force ou la démagogie. Les responsable du fonds de reconstruction d’Haïti, au lieu de construire des maisons pour relocaliser les déplacés, conformément à sa mission, ont préféré distribuer la modique somme de 400 dollars américains à chaque famille pour vider les lieux. Sinon, les bandits viendraient brûler les tentes au beau milieu de la nuit. Des camps ont été mis à feu, chassant ainsi leurs occupants. Lorsqu’on visite le website www.haitireconstructionfund.org, on s’aperçoit de la maigre réalisation de cette organisation et très peu d’informations sont disponibles. Il n’y a pas de véritables programmes de reconstruction en cours, sinon que de petits projets çà et là, mais non intégrés à partir d’un plan directeur. Entretemps, les fonds alloués fondent sous le soleil ardent d’Haïti.
D’après une conversation avec Maitre Newton Saint Juste, le président de l’organisation en charge du symposium du 17 Octobre a Toronto, fait face lui aussi à de fortes pressions. Il sera traduit en justice sous peu, un professeur a porté plaintes contre lui au Canada. En Haïti, la persécution est totale contre les deux avocats instigateurs de plaintes contre le sieur Bill Clinton. Le gouvernement haïtien, parachuté au pouvoir par ce dernier, met en place un système d’intimidation sélective contre toute forme d’opposition. Les avocats Newton Saint Juste et André Michel sont directement visés. Dans un premier temps, André Michel a été arrêté et gardé illégalement en prison pendant 5 jours. Depuis lors, il est en liberté provisoire.
Dernièrement, sous la pression du gouvernement haïtien, le « Bâtonnat de l’ordre des avocats » d’Haïti les a convoqués pour manque d’éthique. Le bâtonnier de l’ordre lui-même, Maitre Hercules Joseph, fait lui aussi objet d’intenses pressions et d’intimidations de la part des avocats proches du pouvoir. Tout ceci se fait dans le but d’entraver la poursuite des plaintes demandant une investigation sur la façon dont l’argent alloué à la reconstruction d’Haïti a été gaspillé.
Aux Etats-Unis, la grande presse ne s’est pas vraiment intéressée à agiter cette question. Les élections sont proches. Hillary Clinton, la femme de l’ancien président Bill Clinton, pourrait être candidate à  la présidence. De ce fait, on évite ce sujet. Ce pourrait être un grand embarras pour la candidate Clinton si on en parle trop. Heureusement, il y aura toujours des gens déterminés à faire le jour sur des affaires aussi crapuleuses, comme celle des milliards de dollars alloués à la reconstruction d’Haïti.
Pour l’instant, on attend les retombées du symposium qui sera organisé à « York University », dans lequel, tous les protagonistes ont été invités à participer, incluant les principaux dirigeants haïtiens, du Canada, de la France et des Etats-Unis d’Amérique. Les avocats Newton Saint Juste et André Michel continuent la croisade pour la vérité autour du gaspillage des milliards de dollars collectés pour reconstruire Haïti. Ces deux-là exposent leur vie quotidiennement en Haïti. Des rumeurs persistantes circulent en permanence sur la possibilité qu’ils soient exécutés à n’importe quel moment par des « bandits légaux » du régime. Sans oublier le lien étroit qui existe entre le gouvernement haïtien et Bill Clinton lui-même. Dernièrement à l’occasion de l’assemblée générale des nations-unies à New York, Bill Clinton a fait des déclarations surprenantes sur la performance du régime haïtien en matière de développement. Ce qui a écœuré tout le monde le fait que celui-ci se comporte en un « cheerleader » du président Michel Martelly.
Que la lumière soit faite, car des milliards de dollars ont été dépensés sans que rien n’ait changé en Haïti !
Joël Leon

Wednesday, September 10, 2014

Ukraine Can't Afford the IMF's 'Shock Therapy'

ARGUMENT

Ukraine Can't Afford the IMF's 'Shock Therapy'

Economic austerity ruined post-Soviet countries in the 1990s. Why are the same policies being forced on Ukraine today?


The war in eastern Ukraine continues to rage on, despite efforts by separatist and national forces to reach a cease-fire. But even if the warring sides reach a long-term truce, the government in Kiev is simultaneously fighting another, perhaps equally important battle: the economy. Unfortunately, President Petro Poroshenko is shooting himself in the foot.
Ukraine's government is in the middle of implementing a set of stringent economic reforms agreed to in April with the International Monetary Fund (IMF) in exchange for a $17 billion bailout. Although Kiev has beencommended by the IMF for a "bold economic program," the loan's terms, combined with Ukraine's political and economic crisis, are a recipe for disaster.
We have seen this story before. During the 1990s, when I worked at the U.S. Agency for International Development (USAID) in the office charged with managing economic reform projects in the former Soviet Union, I observed that the type of austerity now being required of Ukraine was the standard prescription for countries in economic crisis. The leading Washington financial institutions, such as the IMF, World Bank, and U.S. Treasury Department, were passing out this one-size-fits-all solution. And it almost never worked.
Russia was the classic case. In the midst of the political shock caused by the breakup of the Soviet Union, neoliberal reformers supported by the West instituted a policy of so-called "shock therapy" involving an end to price controls and large cuts in government spending and subsidies. The result was a plunge in Russia's GDP and inflation rates averaging 20 percent per month. As the poverty rate climbed to a full 55 percent of the population, there was a widespread political backlash against austerity led by Russian Vice President Alexander Rutskoy, who termed the reforms "genocide" and led a failed attempt to overthrow President Boris Yeltsin in 1993.
Ukraine's current political crisis, of course, differs from Russia's during the 1990s. But Kiev's decision to implement similarly painful austerity measures during its own political turmoil is doomed to fail in the same way, leading to even more instability and crisis in a country that has had more than its share of both over the past year.
This does not mean that Ukraine can forever neglect efforts to undertake reforms. The country has been racked by corruption and poor governance since it became independent in 1991. As a result, 
Ukraine hasendured the worst economic performance of any country in the former Soviet Union.
Ukraine hasendured the worst economic performance of any country in the former Soviet Union. Reforms that reduce corruption and cut government spending and subsidies are necessary if Ukraine is ever going to come close to reaching its economic potential. However, with a collapsing economy and an ongoing war, Kiev needs a semblance of stability far more than shock therapy.
Ukraine is currently in economic free-fall. After estimating that the economy would shrink 5 percent in 2014, the IMF now predicts a 6.5 percent drop in the country's GDP, while some analysts think it could be as high as 10 percent.
While the IMF's loan is designed to support Ukraine's budget and allow Kiev to pay its external debts as they come due, the fund now says that Ukraine's central government will have a substantially higher deficit then originally predicted due to a spike in military expenditures combined with reduced tax collection as its taxable base shrinks along with the broader economy. The IMF now acknowledges that Ukraine could need a further $19 billion in emergency support over the next 16 months.
Despite the economic crisis, the IMF's loan requires Kiev to enact a series of policy changes, all of which will accelerate the collapse of the economy and decrease the purchasing power of ordinary Ukrainians.
The IMF demands that Ukraine make immediate cutbacks to reduce the fiscal deficit. To meet this requirement, Kiev has already enacted a series of laws raising excise and property taxes, reduced social income support expenditures for retirees and public employees, frozen Ukraine's minimum wage, and cut public-sector wages.
Another target is the energy sector. Ukraine is required to increase natural gas and heating tariffs for consumers by 56 percent and 40 percent in 2014, respectively, and by 20 to 40 percent annually from 2015 to 2017. At the same time, as gas prices increase sharply, gas subsidies to end users will be completely ended over the next two years. With Russiaceasing gas supplies to Ukraine since June as a result of a payment dispute, Ukrainian consumers may face further price increases unless Kiev is able to obtain gas from other sources.
Finally, the National Bank of Ukraine has already implemented a floating exchange rate for its national currency, the hryvnia, ending its fixed peg to the dollar. Because the value of the hryvnia has depreciated over 40 percent against the dollar this year, both businesses and consumers are having increasing difficulty servicing their dollar-denominated loans. The country's entire banking system is at risk of wholesale default.
This overall combination of increased taxes and energy costs, decreased wages and social expenditures, and growing inflation is more akin to aKevorkian prescription for Ukraine's economy then a recipe for a return to economic growth. Given that a USAID-funded opinion survey released in April found that a majority of Ukrainians already oppose higher energy tariffs and prices, the political consequences of austerity could be explosive.
The West could help Ukraine through this economic crisis. As a recentBloomberg editorial noted, "In Ukraine, the IMF will in essence be trying an economic solution to a geopolitical problem." Indeed, Kiev's decision to implement austerity in the middle of a bitter civil war is foolhardy for both financial and political reasons: Wars cost money -- lots of it -- and unsurprisingly, Poroshenko has already announced $3 billion in additional defense spending for this year. Given that the second trancheof the IMF's loan is $1.4 billion, the ongoing costs of the war make it extremely unlikely that Ukraine will be able to meet the IMF's fiscal and financial targets.
But the political problems with shock therapy for Ukraine are even greater. The austerity program will further alienate the very citizens of Donbass, the restive eastern region currently hosting the worst fighting. If the country will ever be put back together, the people of the east must feel that Kiev takes their concerns into account. Unfortunately, by implementing austerity when industrial output has as of July declined by 29 percent year-on-year in Donetsk and a whopping 56 percent in Luhansk, the government in Kiev provides just the opposite message to the east.
The Donbass is heavily industrialized, but the IMF's mandate that Kiev slash the large energy subsidies provided to its numerous energy-inefficient Soviet-era factories and mines in the Donbass means that the region's economy is now facing a double whammy from both war and the cutback in financial support. This in turn could raise unemployment in the Donbass, which is not exactly a recipe for promoting reconciliation.
Beyond the need to prioritize political stability over austerity, any economic reform program in Ukraine should include debt relief. This means that 
Ukraine's foreign creditors should be made to take haircuts on their loans to Kiev.
Ukraine's foreign creditors should be made to take haircuts on their loans to Kiev. There is a recent precedent for this approach in Cyprus, where the holdings of large depositors and bondholders were converted to equity in the country's largest bank, the Bank of Cyprus. Investors already understand that a Ukrainian debt restructuring is now a question of "when, not if," and Ukraine's Ministry of Finance and the National Bank of Ukraine should negotiate a comprehensive debt-restructuring program directly with foreign creditors.
Despite sometimes-lengthy delays in negotiations, a 2012 IMF studyfound that investors in emerging markets generally come to terms with debtors. This offers Kiev ample precedent to use in negotiations with its foreign creditors, making a debt restructuring the most logical course for Ukraine to follow. As with any restructuring of liabilities, the terms of the loan or bond determine how losses are allocated. Absent this "bail-in" of foreign creditors, Ukraine will simply be taking on more debt that it lacks the capacity to service, risking a long-term compound debt spiral for the country and practically guaranteeing a wholesale default down the road -- and continuing political instability.
Finally, the West should provide Ukraine with aid that doesn't come with the IMF's harsh conditions. Through a combination of grants and low-interest loans subsidized by the United States and the European Union that could be rolled over as necessary, Western governments directly -- rather than the IMF -- could assist Ukraine with a recovery program that focuses first and foremost on jump-starting the country's economy rather than one that further squeezes it.
The road ahead for Ukraine will not be easy. The country faces a violent civil war, political distrust, and a collapsing economy. It needs all the help it can get right now, not the IMF's painful medicine.
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