Après 25 ans de désorganisation politique, économique, sociale et culturelle, « HAITI IS OPEN FOR SALE » !
Par Joël Léon
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Le 1 mai 2012
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Tout
Haïtien qui réside à l’étranger, plus spécifiquement aux Etats-Unis,
fait face aux nombreuses questions des curieux ou spécialistes sur Haïti
concernant l’avènement de Michel Martelly au pouvoir. C’est douloureux
de constater l’embarras avec lequel mes compatriotes tentent d’expliquer
rationnellement, si ce n’est par la folie, ce phénomène incongru qui,
malheureusement, se rencontre l’histoire des peuples. On se souvient du
règne de Caligula de la Rome antique, d’Indira Amin dada en Ouganda...
Tant bien que mal, en bon haïtien, chacun arrive à s’en sortir à partir
d’explications, se fait beaucoup d’interrogations, parce que n’arrivant
pas à s’en convaincre. Mon ancien professeur d’histoire américaine, un
fervent défenseur d’Haïti, me somma au cours du mois d’Avril de l’année
dernière de venir le voir pour des consultations au sujet du nouvel élu
haïtien. Donc, Aucune question ne m’a été épargnée, une façon amicale de
me mettre sur la sellette.
Comme
je l’ai écrit incessamment, les Clinton (époux/épouse) sont les deux
principaux faiseurs de roi en Haïti. D’après une source proche de
l’ancienne candidate malheureuse à la dernière présidentielle, Myrlande
Manigat, tout avait été conçu pour qu’elle accède au pouvoir. Ou du
moins, jusqu'à l’arrivée du fameux émissaire du département d’Etat. Cet
américain avait comme mission ultime de choisir le nouveau président
d’Haïti. Après plusieurs interviews avec les deux candidats, il a jeté
de façon inattendue son dévolu sur Michel ou Michael Martelly. Une seule
approche a été considérée : le choix de qui peut mieux défendre les
intérêts de l’Amérique au palais national d’Haïti. On peut s’étonner de
la nature des intérêts américains en Haïti. Un pays appauvri par trois
siècles de colonisation Européenne et très lourdement handicappé par
une dette française estimée aujourd’hui à 21 milliards de dollars
américains. Les intérêts américains sont les mêmes partout, que le pays
soit riche ou pauvre. Il n’y a pas de compassion. C’est la nature même
de l’empire qui l’exige.
En
face de l’émissaire américain, Martelly s’est imposé comme le chantre
garant de l’intérêt impérial en Haïti. En quelque sorte, il a offert
plus qu’on lui avait demandé. La femme de Martelly, Sophie, allias « gwo
soso », américaine de naissance, fut singulièrement agressive jusqu'à
proférer des menaces à peine voilées sur ce qui pourrait arriver dans le
pays au cas d’un choix contraire à celui de son mari.
Quant à
Madame Myrlande Manigat, toujours d’après la même source, elle a été
trop intellectuelle probablement par déformation professionnelle.
Ajouter à cela le lourd fardeau de son mari, Lesly Manigat. Celui-ci n’a
jamais été bien vu par l’establishment américain. Les Dominicains de
l’autre côté de la frontière ne la tolèrent pas non plus. D’ailleurs, le
credo louverturien alarme les puissances impérialistes. La plus grande
peur de l’international vis-à-vis de la candidate, c’est qu’elle puisse
prendre des initiatives claniques dignes d’une rdnpiste
(son parti politique, RDNP). L’émissaire décela une pointe de sentiment
national dans son verbe rappelant étrangement celui de son mari, 22 ans
auparavant, lorsqu’il tenta de se rapprocher de l’Europe. Vu
l’importance des grandes escroqueries à venir au profit de
l’international, c'est-à-dire les pillages programmés des ressources
naturelles nationales, il fallait éviter tout obstacle. On ne voulait
pas prendre de chance avec une femme soumise qui pourrait se lancer dans
des aventures nationalistes sous la dictée de son mari. Lui, qui se
croit plus intelligent que tout le monde, il est en hibernation. C’était
le récit d’un proche de Myrlande Manigat, il a vu voler en fumée son
rêve d’homme d’Etat, en moins de 4 heures.
Voilà
les raisons fondamentales qui expliquent le parachutage de Michel
Martelly au pouvoir au détriment de Myrlande Manigat. Sous un angle
analytique, tout nationaliste digne de ce nom n’aimerait jamais se
trouver dans une position où, pour arriver
au pouvoir il lui faut être parachutée par une puissance étrangère. Les
dernières révélations de la presse Dominicaine à propos des 250.000
dollars américains reçus d’un sénateur corrompu du parlement de
la république voisine viennent de saper mortellement sa crédibilité.
J’avais écrit que Mme Manigat allait subir une défaite politique et
personnelle, longtemps avant le premier tour des dernières élections.
J’avais raison. Parfois, je me demande si ceux-là qui font de la
politique active en Haïti ne se souviennent pas de l’histoire d’Anténor
Firmin et de Rosalvo Bobo. Une trop courte mémoire conduit
inéluctablement à l’abattoir de l’Histoire.
Bill
et Hillary veulent l’annihilation d’Haïti comme état souverain. Ils
savaient pertinemment que la mentalité et les antécédents conflictuels
de Michel Martelly allaient soulever de l’hostilité dans la classe
politique et l’intelligentsia du pays. Ils connaissent le tempérament
volcanique de l’homme de Pétion-Ville et son caractère psychologique
instable. Ils sont au courant du passé marqué de prestations artistiques
indécents et de l’usage abusif avoué de la cocaïne de
Martelly. Sans oublier les persistantes rumeurs quant à sa
participation dans la distribution de la drogue dans le pays à travers
son gang appelé « bandit légal ». Ils soutiennent en privé l’inaptitude
de celui-ci à diriger le destin de 10 millions d’âmes à un moment où
tout est versatile dans le pays. Mais ils le maintiennent au pouvoir
coûte que coûte pour des gains géopolitiques impérialistes et
personnels. Ils sont témoins de la culture de l’opposition systématique
des élites face à leurs adversaires. Bill et Hillary ont piégé le peuple
haïtien en lui imposant l’homme le plus décrié du pays à la présidence.
Ils veulent être les seuls maîtres de la terre de Jean Jacques
Dessalines.
Un ami m’a confié que le département d’Etat a hissé Martelly au pouvoir pour
être à même de dire que « le peuple a le gouvernement qu’il faut ». Si
cet adage est vrai, il ne s’adapte pas à Haïti. Le peuple n’a pas voté
Martelly au pouvoir. 700.000 sur 4 millions de personnes en âge de voter
l’ont choisi en 2011. L’Amérique l’a fait. C’est ce que Frantz Fanon et
Jean Paul Sartre ont élégamment décrit dans les « damnés de la terre »
et autres textes. Martelly est « un mensonge vivant ». Les Clinton
considèrent l’haïtien « comme un peuple arrêté dans son évolution », de
ce fait « incapable de diriger ses propres affaires ». Par exemple,
incapable d’élire des dirigeants patriotes et compétents. Donc, le
peuple à toujours besoin de « la présence permanente d’une direction »,
comme si « Haïti a commencé avec l’arrivée des Clinton ».
Deux
ans de cela, Bill Clinton demanda pardon au peuple haïtien pour avoir
réduit à néant la production agricole nationale d’Haïti lors de ses deux
mandats présidentiels. Comme si le pardon suffisait pour réparer la
souffrance infligée au pays. Ensuite, il a placé au pouvoir le plus
grand corrupteur, Michel Martelly, pour mieux ruiner le pays afin de
demander de nouveau pardon au peuple haïtien. L’international est en
train d’insulter l’intelligence de tout un peuple.
Cette
animosité américaine institutionnalisée à l’endroit des Haïtiens date
de Thomas Jefferson, président des Etats-Unis de 1801 à 1809. En 1797,
pendant que la guerre de libération nationale faisait rage en Haïti, Thomas
Jefferson a écrit, et je cite : « Si nous n’agissons pas, et ceci
maintenant. Nous serons les assassins de nos propres enfants ». Il
redoutait avec affolement une victoire des Indigènes en Haïti. Car, cela
sonnerait le glas du système esclavagiste, raciste et colonialiste.
Cette approche hante encore la politique américaine vis-à-vis d’Haïti.
Le peuple haïtien est perçu comme un danger imminent à la domination
impériale américaine.
Jusqu’en
1820, Jefferson complota encore contre Haïti en proposant à
l’administration d’alors d’expédier en Haïti tout enfant né de race
noire. Ce que l’ancien président ignorait, c’est que tout homme ou femme
qui foulait le sol haïtien, était déclaré libre depuis le 1er Janvier
1804. Sans tenir compte de la couleur de la peau, de la nationalité ou même de l’origine sociale. Ce fut un humanisme verdoyant trempé dans un désintéressement fécond.
La
politique étrangère américaine est inspirée du jeffersonisme. C’est
pourquoi le pays fut envahi en 1915, après que les Américains ont
contribué à nos malheurs en boycottant Anténor Firmin afin de propulser
Nord Alexis au pouvoir. Lui qui fut un grand admirateur de l’Amérique,
et qui avait prédit depuis 1898, l’avènement d’un noir à la Maison
blanche dans environ un siècle. Nous ne pouvons oublier le massacre de
1928 à Marchaterre, et les humiliations des militaires américains faites
au peuple haïtien, après avoir emporté la réserve nationale d’or. En
2011, l’international a réédité cette triste histoire en parachutant
Martelly au pouvoir.
C’est
sous l’occupation américaine de 1929, que ce tracé frontalier
défavorable à Haïti mais bénéficiaire à la république Dominicaine fut
achevé. A la première conférence
panaméricaine de 1826, les Etats-Unis exercèrent de fortes pressions
sur les dirigeants latino-américains de l’époque pour refuser toute
participation haïtienne. Eux, qui venaient d’accéder à l’indépendance
grâce à l’aide financière, militaire et humaine d’Haïti. Conformément à
la grandeur de l’épopée héroïque de 1804.
Malgré
tout, Haïti a été toujours un allié fidèle des Etats-Unis d’Amérique. A
la lumière de l’histoire récente du début des années 40, soit 1941,
Haïti fut le premier état de l’hémisphère à déclarer la guerre à
l’empire Nippon et aux autres puissances de l’axe. Irrité par l’attaque
des Japonais sur Pearl Harbor, le président Elie Lescot, dans l’esprit
de notre grande tradition diplomatique que « le pays de Jean Jacques
Dessalines doit être du côté des victimes », a ordonné aux forces
publiques haïtiennes de procéder à l’arrestation de tout citoyen
Allemand et Italien vivant dans le pays. Le 12 Décembre, des dizaines de
ces sujets furent internés au Fort national. Les autorités haïtiennes
de l’époque agissaient vigoureusement contre les bellicistes des
puissances de l’axe avant même que les américains leur déclarèrent la guerre, eux les premiers touchés.
Il
faut rappeler aussi le butin de guerre consenti par la république
d’Haïti en soutien aux forces alliées. Cette contribution s’élève à plus
d’un milliard de dollars américains, car la figue banane fut liquidée à
moitié de son prix réel. Sans oublier les dommages causés aux terres
arables du pays par la plantation de sisal pour confectionner des cordes
a bon marché au service de l’armée américaine en guerre pour libérer
l’Europe du fascisme.
Par
contre, quand en 1897, la marine Allemande humilia Haïti au cours de
l’affaire Luders en souillant le bicolore national sous la menace
canonnière, les Américains brillèrent par leurs mépris. Le Kaiser
finalement exigea de l’Etat haïtien 20.000 dollars pour dédommager un
citoyen haïtien, né en Haïti, mais de père Allemand, du nom de Luders.
L’Amérique n’eut dit mot. Et pourtant la doctrine de Monroe éait déjà en
plein effet dans l’hémisphère, dixit « l’Amérique aux américains ».
L’Allemagne traversa l’Atlantique pour punir le peuple noir orphelin
d’Haïti. La doctrine de Monroe ne saurait s’appliquer au profit de
nègres, dont les pères sont encore en Afrique. Aujourd’hui, je vous le
dis, en vérité l’Haïtien n’est fils de personne.
C’est
dans ce contexte de haine chronique que les relations entre les deux
états ont évolué à travers les ans. Thomas Jefferson influence encore la
politique américaine en Haïti. Des optimistes s’attendaient à un
revirement diplomatique après la matérialisation de la prédiction de
Firmin, avec un noir à la présidence. Ils se sont trompés de bonne foi.
J’avais prédit dans « Barak Obama, ni Jésus Christ ni Fidel Castro »,
qu’il n’allait apporter aucun changement significatif ni
en Haïti ni dans le reste du monde. Car, la politique américaine
s’insère dans une logique impériale, dont l’essence est d’étendre l’autorité de l’empire sur les autres états.
A la
lumière de ces éléments, nous comprenons les causes profondes du
parachutage de Michel Martelly au pouvoir, malgré lui. Sa mission
secrète est de rendre la situation haïtienne encore plus chaotique pour
que l’international justifie sa main mise totale sur les ressources
minérales du pays. C’est une politique d’usure que l’international
s’applique en Haïti. L’Irak et la Libye sont les victimes d’une longue
série pour les mêmes raisons, ressources minières ou pétrolifères. Haïti
est la prochaine victime, l’impérialisme a déjà commencé depuis des
années avec sa politique de « désorganisation et réorganisation ».
C’est-à-dire le démembrement de l’état d’Haïti.
Michel
Martelly est le dernier en date des pions de l’Oncle Sam pour
complètement désorganiser Haïti et, d’après tous les indices, nous
assistons au dernier acte du drame. Le sale matraquage psychologique
contre Haïti a l’échelle mondiale est achevé, le pays est sur la liste
des états parias malgré toute sa glorieuse histoire. La référence de
liberté qui fut notre marque de fabrique est falsifiée et remplacée par
l’ignorance, l’inculture et la misère. L’Etat d’Haïti est à genoux. Bill
Clinton, « le nouveau proconsul d’Haïti », fait la loi. Enfin, « Haïti
is open for sale » ! Haïti est à vendre !
Joël Léon
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C'est un espace d'analyses progressistes au service de ceux qui s'interessent a comprendre la realite sociale, politique, economique et culturelle haitienne. De nouveaux articles sont postés regulierement, soit du proprietaire du blog ou d'autres analystes progressistes du monde. Donc, j'invite tout le monde a visiter le blog pour une meilleur connaissance des evenements haitiens et du monde. Merci!
Wednesday, May 2, 2012
Apres 25 ans de desorganisation politique, economique, sociale et culturelle, " HAITI IS OPEN FOR SALE"
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