Thursday, June 26, 2014

Drones américains: «un précédent dangereux dans le monde»

Drones américains: «un précédent dangereux dans le monde»

mediaSelon le Stimson Center, un cercle de réflexion à Washington, l’administration américaine s'est octroyée le droit de tuer toute personne soupçonnée d'appartenir à al-Qaïda ou ses affidés.DR
Le recours aux frappes de drones par les Etats-Unis contre des extrémistes crée un précédent dangereux dans le monde. C'est le bilan d'un rapport, publié ce jeudi 26 juin par d'anciens hauts responsables américains du renseignement et de l’armée.
Avec insistance, ils demandent à l'administration Obama de fixer enfin un cadre légal pour cette pratique et de garantir une plus grande transparence quant aux victimes de ces frappes. La crédibilité mais surtout la sécurité des Etats-Unis en dépend, estiment-ils.
Que se passerait-il si Moscou décidait d'utiliser des drones armés en Ukraine pour abattre des soi-disant « terroristes » ? Les Etats-Unis auraient-ils alors la crédibilité morale pour condamner un tel acte ? La réponse est non. Voilà en résumé ce que soulignent les auteurs d'un rapport, publié ce jeudi 26 juin par le Stimson Center, un cercle de réflexion à Washington. Selon ce centre, l’administration américaine s'est octroyée le droit de tuer toute personne soupçonnée d'appartenir à al-Qaïda ou ses affidés dans « n'importe quel pays, à n'importe quel moment, sur la base de critères et de preuves gardés secrets ». Ce faisant, les Etats-Unis violent le droit international et courent surtout le risque d'être imités par d'autres pays, estiment les experts. Des pays qui pourraient être tentés de tuer à l’aide de drones des opposants politiques tout en faisant valoir leur lutte contre le terrorisme international, avertit encore le rapport.
Urgence de fixer un cadre légal et de sortir du secret
Ils sont dix, tous d’anciens hauts responsables américains du renseignement et de l'armée, et ils sont unanimes : l’administration Obama doit enfin fixer un cadre légal pour l'utilisation des drones armés contre les terroristes et lever le voile du secret qui entoure toujours ces frappes. Un secret qui menace aussi le processus démocratique aux Etats-Unis, estiment les auteurs, puisqu’il prive le Congrès américain de son rôle d’instance de contrôle.
Ce n’est pas la première fois que le recours des Etats-Unis aux frappes de drones contre les extrémistes fait objet de vives critiques. En mai 2013, Barack Obama avait été contraint de prendre position sur ce programme controversé. Dans un discours très attendu à la National Defense University de Washington, le président américain avait voulu rassurer : « Le recours aux drones est strictement encadré », avait-il déclaré. « Les Etats-Unis ne font pas recours aux frappes lorsque nous avons la possibilité de capturer des terroristes, notre préférence est toujours de les capturer, de les interroger et de les poursuivre en justice. Nous agissons contre des terroristes qui représentent une menace continuelle et imminente contre les Américains, et lorsque d’autres gouvernements ne sont pas capables de réagir à cette menace ».
Des promesses de Barack Obama restées lettre morte
Barack Obama avait annoncé à la même occasion avoir signé une directive qui limite les conditions de lancement de drones et qui replace la responsabilité de ces frappes entre les mains des militaires. La CIA, ces dernières années en charge des pratiques de lutte antiterroriste, devrait retourner à sa mission de renseignement. Mais selon de nombreux observateurs américains, ces annonces présidentielles sont restées pour l’instant lettre morte. La CIA continue de mener les frappes de drones au Pakistan et au Yémen. Et jusqu’à présent, la plus grande transparence promise par l’administration Obama concernant les victimes (terroristes présumés et civils) de cette pratique n’est toujours pas d’actualité. Selon la New America Foundation, en cinq ans, entre 3 000 et 4 000 personnes ont été tuées par des attaques de drones américains au Pakistan et au Yémen. Washington n'a reconnu que quatre de ces victimes, toutes de nationalité américaine.

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