Friday, June 13, 2008

L'ORGANISATION! L'ORGANISATION! L'ORGANISATION!

L’organisation ! L’organisation ! L’organisation ! Par JOEL LEON Nous sommes à plus de vingt ans de l’après-1986. Le pays fait incessamment « marche arrière », l’élite progressiste continue de bousculer rageusement l’international comme instigateur des malheurs du peuple haïtien. C’est vrai, moi aussi j’ai publié de nombreux articles dénonçant le projet international pour le tiers-monde, en particulier Haiti. Mais l’occident ne va pas changer de politique, en dépit de nos plaintes et complaintes, parce qu’elle est taillée sur mesure pour répondre à ses intérêts économiques, politiques et sociaux conformément à ses ambitions de suprématie. Ne devons-nous pas avoir notre propre projet en vue de contrecarrer l’ordre occidental et surtout d’imposer notre vision tiers-mondiste dans nos pays respectifs ? L’honnêteté exige que nous admettons que la lutte pour le changement progressiste et humaniste en Haiti a beaucoup reculé durant ces vingt dernières années. Nous ne sommes pas à « l’heure du bilan », pour répéter l’autre, mais a l’air d’adopter une attitude critique par rapport à l’évolution des contradictions sociales dans le pays est juste et favorables a des changements profonds, et que nous n’avions pas pu exploiter efficacement. Le problème fondamental est la faiblesse de notre capacité organisationnelle à l’échelle nationale, condition indispensable à la victoire du peuple haïtien. « Une organisation est un ensemble d'éléments en interaction, regroupés au sein d'une structure régulée, ayant un système de communication pour faciliter la circulation de l'information, dans le but de répondre à des besoins et d'atteindre des objectifs déterminés ». Donc,l’organisation est là pour assurer l’unification d’un ensemble complexe, du point de vue idéologique et politique, en une machine opérationnelle dont l’objectif à court, moyen et a long terme doit être le succès total ou partiel. Si en sciences exactes il est plus facile de déboucher sur des résultats concrets à partir d’approches bien élaborées et redistribuées sous forme de postulats changeants à un ensemble large ou restreint, mais en matière de sciences sociales, c’est devenu une casse-tête chinois. Faut il abandonner pour autant ? Jamais ! La lutte politique pour le changement en Haiti souffre d’anémie idéologique et structurelle. D’autres raisons peuvent être retenues pour l’expliquer, moi je préfère rester dans le domaine pur de la structuration. L’échec dans les tentatives de créer un parti politique de masse constitue l’élément moteur des revers subis pendant ces vingt dernières années. Des expériences ont été faites à l’intérieur et en dehors du pouvoir, mais elles n’ont fait l’objet d’aucune étude rigoureuse afin d’élaborer des réflexions sur les avancées et les reculs. Il y a un probleme de methode et de production intellectuelle accablant chez les leaders des masses populaires. Les références, sauf orales, sont presque inexistantes dans le pays. Les maigres tentatives d’étude des exploits des militants dans le passé ont soulevé tellement de polémiques, que finalement les générations futures, qui devraient en être les bénéficiaires, sont enterrées dans la confusion, et se tournent vers la littérature guerrière des autres peuples pour appréhender leurs propres réalités de luttes. L’organisation politique ne s’organise jamais autour d’un homme ou des hommes, mais autour des idées. Mais l’organisation a besoin de vrais leaders pour assurer son développement, et sa croissance jusqu’à maturité, qu’est la prise du pouvoir. Donc, il est indispensable à ce que les idées soient clairement définies et véhiculées massivement dans le peuple. Je peux compter deux organisations politiques en Haiti, qui s’identifient comme des organisations de masse, Fanmi lavalas et Parti Populaire National. Après quoi, tous les autres partis politiques qui autrefois se réclamaient des masses, se sont transformés en des outils de répression contre celles-ci. Mais ces deux partis affichent des faiblesses scandaleuses et ils sont complices des revers subis, notamment dans les deux coups de 1991 et de 2004. Nous devons admettre le fait que le parti Fanmi Lavalas a pris naissance dans un contexte particulier de paradoxe, les principaux dirigeants étaient soit au pouvoir ou de pretendants assures du pouvoir. Le problème avec cette réalité, c’est qu’elle est plus susceptible de voir une pareille organisation envahie par des opportunistes conduisant a une dérive populiste noyant les structures organisées et les militants issus des entrailles des masses. Depuis 1986, on a souvent répété dans le pays que « pouvwa w nan lari », donc ceci explique la fragilité du pouvoir politique donnant lieu à des turbulences politiques sporadiques nuisibles au développement socio-économique national. Cette réalité, generatrice de pauvrete, ne sera pas conjurée sans l’existence de cette organisation politique de masses, porteuse des revendications populaires cristallisées dans leurs représentants sous l’oeil bienveillant des masses. La lutte elle-même doit produire la majorité de ces dirigeants, l’objectif est d’arriver a la formation d’une équipe au sein de l’organisation politique. L’équipe est nécessaire pour gagner En sport, le mot équipe est dominant. Au niveau de l’administration on parle plus souvent de leadership ou de comité directeur, mais tous sont régis par des qualités universelles qui s’imposent à tous. La politique n’y échappe pas non plus, je veux parler de compétence, honnêteté, inspiration, courage, loyauté...Ces qualités doivent être identifiées et promues au sein de l’organisation politique. Cela donnera lieu au renouvellement régulier des cadres du parti à partir de l’excellence et de la conviction. Une équipe de football est d’abord un ensemble comprenant des joueurs venus de differents horizons ayant assumé la responsabilité de faire triompher le drapeau de cette équipe. Cela veut dire que l’équipe est d’abord une conception institutionnelle ayant des manifestations de jeux d’ensemble sous la baguette d’un entraîneur. Au départ l’équipe n’est pas constituée, elle le devient lorsque les joueurs peuvent lire les mouvements de l’un et l’autre sans même échanger un mot. Ce jeu d’ensemble constitue l’essence d’une équipe ; pour y arriver, les joueurs doivent s’entraîner ensemble d’innombrables fois sous le leadership d’un homme compétent, honnête, inspirateur, loyal et courageux, lui à la tête d’un staff composé de techniciens dans des domaines variés relatifs au football...Ce scénario reflète exactement la conception classique d’une organisation politique. Le fait de réfléchir et de lutter ensemble à travers des actions concrètes, approfondira une connaissance humaine réciproque, développera des pratiques communes et surtout un engagement actif et discipliné indispensable pour les grands combats de demain. Sans cet exercice académique et pratique, le parti des masses ne sera jamais en mesure de faire respecter les droits du peuple. L’absence de l’équipe conduit aux revers Les cinq ans de pouvoir lavalas nous enseignent beaucoup, 2 ans d’un mandat de 5 ans, février 1991-septembre 1991, d’octobre 1994- février 1996, et de février 2001 a février 2004. Nous concluons que les masses ne suffisent pas pour garantir l’exercice du pouvoir. Le peuple reste et demeure le faiseur d’histoire, mais à travers son organisation, ses chefs et la discipline. Les multiples revers subis de 1986 à aujourd’hui sont dûs exactement à cette carence organisationnelle. Les trahisons et défections jonchant le secteur dit progressiste sont les conséquences de l’inexistence d’une structure appropriée marquée par une allégeance inviolable à partir de positions politiques hautement de commande. Les dérives et invasions d’intrus pouvaient être conjurées facilement si la militance était contrôlée et rapportée régulièrement dans les archives de l’organisation. Les infiltrations et traffics d’influences qui endommageaient le pouvoir et le parti simultanément auraient pu être evites si et seulement si on avait un parti schématiquement organisé. Donc, il faut commencer par le commencement en entamant « un processus de rectification ». Abraham Lincoln a échoué en deux fois dans les affaires, il a été battu dans six états dans des élections nationales avant de devenir président des Etats-unis. Son héritage est cher aux américains. Il ne faut pas avoir peur de la défaite, il faut avoir peur du découragement et du traumatisme de l’impuissance. Que faire ? En dépit de cette analyse critique du parti des masses, personne ne souhaite la disparition de Fanmi Lavalas ou son remplacement par un autre. Par contre, il faut mettre en branle un processus actif de rectification appuyée par les dirigeants les plus influents du parti. Un renforcement institutionnel est fondamental, seul moyen sûr de préparer les futurs cadres du parti pour assurer la relève et tenir en alerte et aguerri les bases du parti. L’éducation des membres de façon permanente et nationale est indispensable à l’implantation effective du parti dans toutes les circonscriptions. Ils doivent être armés idéologiquement et politiquement afin d’assurer la permanence de la guerre psychologique sur le terrain. Doter Haiti d’un parti fort et discipliné est le plus beau cadeau que cette génération pourrait léguer à la postérité. Avec une organisation bien implantée dans les masses, la prise et le maintien du pouvoir, malgré vents et marées, deviendra un jeu d’enfants. L’accès au pouvoir sans les moyens politiques, c’est à dire la capacité de poser des actions dans l’intérêt des masses conformément aux promesses de transformation sociale développées dans le programme du parti, compromettra l’avenir politique des masses. On a vu ce qui est arrivé en 1991 et 2004, les masses ont payé un lourd tribut. La résistance dans les deux cas portait les stigmates decourageants lies a l’inorganisation du parti. Il est impératif que le parti des masses soit réorganisé en fonction d’un schéma révolutionnaire, c’est a dire l’introduction d’idées nouvelles appuyées par des stratégies non traditionnelles. Le changement pour les pauvres doit sortir de l’ornière habituelle de l’innocence. Le parti des masses doit se positionner et se préparer à toute éventualité débordant le cadre légal. Car, ne pouvant gagner par des voies directes, il devra recourir à des techniques obliques, l’essentiel pour lui étant d’arriver à ses fins. L’innocence n’est pas une arme pour le changement en faveur des masses, donc il faut un parti capable de maîtriser des situations volatiles lorsque les forces publiques sont dépassées, hostiles, démissionnées ou domestiquées. Cela fait partie de la « real-politik ». Plaidoyer pour un parti de masse est le discours du moment. La section responsable de l’organisation doit être opérationnelle en fonction d’une approche démocratique certes, mais renforcée par un support compétent pour évaluer les méthodes, faire les adaptations et produire les solutions appropriées. Car de nos jours la planification stratégique est présente dans toutes les disciplines humaines, et pourquoi pas l’appliquer dans la politique, particulièrement celle des masses ?. D’ou la nécessité de former les cadres stratégiques: ils seront la mémoire et le futur de la lutte haitienne a un niveau plus globale. Il faut toujours garder à l’esprit que la lutte pour supprimer la pauvreté de la surface de la terre ne saurait être nationale, elle est internationale. C’est à dire qu’il faut allier le combat culturel à celui de la politique, les symboles et les slogans de lutte sont plus puissants que toutes les armes de destruction massive connues. Tout ceci c’est pour mettre en exergue l’importance du travail intellectuel dans la lutte de libération des masses à travers ses organisations politiques et sociales. L’organisation politique de masse s’impose à tout penseur progressiste comme un postulat pour la transformation de la société. Elle doit être une priorité, sans elle nous n’arriverons jamais a faire face aux attaques de la réaction et éliminer les risques de revers. Joel Leon

No comments: